Login

Blé tendre Sous l’emprise de la mer Noire

L’ampleur du disponible russe et le retrait massif de l’origine ukrainienne joueront un rôle clé sur les marchés lors de la campagne 2023-2024, alors que l’équilibre du bilan mondial s’annonce déjà très sensible au moindre aléa. Décryptage.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Le retrait de la production de blé en Ukraine d’une part et la relative abondance en Russie de l’autre seront-ils les principaux catalyseurs de l’évolution des prix de la campagne de commercialisation 2023-2024 sur les marchés mondiaux ? Cette hypothèse a en tout cas été défendue par plusieurs analystes internationaux du marché du blé qui s’exprimaient fin janvier à l’occasion de la Paris Grain Conference organisée par Argus Media France (Agritel).

Peu de pays pour amortir

Compte tenu du contexte géopolitique actuel lié à l’agression russe en Ukraine, cette hyperpolarisation du marché autour des pays de la mer Noire est de nature à susciter de l’incertitude, et donc certainement de la volatilité et des tensions sur les prix. D’autant plus que les grandes puissances exportatrices occidentales, comme l’Australie, l’Europe et les États-Unis, ne pourraient que partiellement jouer le rôle d’amortisseur pour encaisser les chocs. Ces projections semblent d’ailleurs en partie être intégrées par les marchés. Les cours mondiaux restent en effet à des niveaux historiquement élevés, à 280 €/t sur le port de Rouen à la mi-février, malgré de très bons niveaux mensuels d’exportation de la Russie, de l’Australie et dans une moindre mesure du Canada et de l’Europe du Nord.

Dépendance à l’origine russe

L’un des facteurs d’incertitude vient de la répartition des 60 Mt de stocks de blé présents dans les grands pays exportateurs et dont un tiers est localisé en Russie. Moscou s’est imposé régulièrement ces dernières années comme le premier exportateur mondial. Or dans le contexte actuel, la dépendance des marchés à l’origine russe pose la question de la fiabilité de l’approvisionnement. Il n’est pas impossible que le Kremlin utilise la faim comme une arme pour peser sur l’échiquier géopolitique. Ce poids de la Russie lié au commerce mondial du blé pourrait d’ailleurs se renforcer avec un potentiel de récolte qui était annoncé en février à un bon niveau, à 86 Mt (contre 91 Mt en 2022). De son côté, l’Ukraine, qui était le cinquième pays exportateur mondial avant la guerre, devrait engranger sa plus petite récolte de blé depuis 2007-2008 à 20 Mt. Des problèmes de retour sur investissement et d’accès aux marchés en sont les principales causes (lire encadré ci-dessous).

Sécheresse aux États-Unis

S’ajoutent à cela des perspectives de production en stagnation, voire en baisse pour les autres grandes puissances exportatrices. La moisson s’annonce en stagnation en Europe. La campagne prochaine devrait également être décevante aux États-Unis selon les projections. En effet, une sécheresse très importante dans le sud-ouest du Kansas a déjà entamé le potentiel de production américain avec des prévisions de récolte en baisse dans ce grand pays exportateur. En outre, la sortie du cycle météorologique La Niña et le retour du phénomène El Niño pourrait fortement pénaliser la production australienne en 2023. « Il n’y a pas de record de production de blé à attendre sur les marchés à date, souligne Nathan Cordier, analyste chez Agritel. La situation est équilibrée mais reste fragile au sein des grands pays exportateurs. »

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement